Frédéric Pogent
CREAD, Université de Bretagne Occidentale
NT 5 / 2025 - T1
Résumé - Cette étude porte sur l’impact de la généralisation de l’usage du numérique sur l’activité humaine, plus particulièrement dans le cadre des actions de formation. Plus concrètement encore, notre préoccupation est ici de questionner l’environnement de formation hybride initié en 2013 par le Ministère de l’éducation nationale (M@gistère) et qui a été réaffirmé comme une des modalités principales de la formation continue des personnels du ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
L’enquête présentée vise ainsi deux objectifs principaux : 1) produire une connaissance objectivée de l’activité déployée ou mobilisée dans les relations (couplages) entre les acteurs et l’environnement de formation, en prenant appui sur l’analyse des perceptions, préoccupations, attentes, appropriations, manières de faire, dynamiques et tendances, formes de l’instrumentation ; 2) sur ces bases, contribuer à la conception d’environnements numériques de formation continue et à l’efficacité de l’accompagnement des Professeurs des écoles (PE) dans leur développement professionnel.
Sur le premier point, cette étude révèle une diversité des modes d’appropriation des environnements de formation et des effets qui en découlent. Elle pointe notamment des non-congruences entre les postures adoptées par les PE quand ils passent du rôle d’apprenant à celui d’enseignant et inversement.
Mots clés - Formation continue (des professeurs des Écoles), Environnement hybride (présentiel, distanciel), Construction de l’expérience, Dispositifs de formation, Instrumentation des apprentissages, Configuration d’activité.
Cette étude porte sur l’impact de la généralisation de l’usage du numérique sur l’activité humaine, plus particulièrement dans le cadre des actions de formation. Plus concrètement encore, notre préoccupation est ici de questionner l’environnement de formation hybride initié en 2013 par le Ministère de l’éducation nationale (M@gistère) et qui a été réaffirmé comme une des modalités principales de la formation continue des personnels du ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports [1]. Diverses modalités de formations leur sont proposées telles que des formations accompagnées, hybridées en présentiel ou totalement à distance, des modules en auto-formation et des espaces de développement professionnel.
L’objet de notre recherche concerne cet environnement de formation dans le cadre de la formation continue des professeurs des écoles (PE) pour d’une part en connaître ses différents modes d’appropriation par les usagers et d’autre part mesurer les conditions de son efficacité.
L’enquête présentée s’inscrit dans le prolongement de telles préoccupations, en s’intéressant à l’activité des PE en situation de formation hybride. Elle vise ainsi deux objectifs principaux : 1) produire une connaissance objectivée de l’activité déployée ou mobilisée dans les relations (couplages) entre les acteurs et l’environnement de formation, en prenant appui sur l’analyse des perceptions, préoccupations, attentes, appropriations, manières de faire, dynamiques et tendances, formes de l’instrumentation ; 2) sur ces bases, contribuer à la conception d’environnements numériques de formation continue et à l’efficacité de l’accompagnement des PE dans leur développement professionnel. Cette étude est aussi portée par l’hypothèse d’une dynamique spiralaire de l’activité (Linard, 1989, 1994, 2019 ; Albero, Guérin, 2014) qui permet d’articuler les visées de production de connaissances empiriques et celles de conception d’environnements de formation plus en adéquation avec les réalités des pratiques.
Notre recherche s’inscrit dans le cadre d’une approche écologique de l’agir humain en éducation et formation (Guérin, Simonian & Thievenaz, 2023) qui propose un cadre d’analyse pluri-référencé permettant d’analyser les interrelations entre les sujets et leurs environnements ainsi que leurs transformations dans le cadre d’écosystèmes variés considérés comme des totalités complexe. Notre parti pris méthodologique s’appuie sur le concept central de configuration sociale (Elias, 1970) et sur l’articulation de deux cadres théoriques ; celui de la sociotechnique (Albero, 2004, 2010a/b) et celui du cours d’action (Theureau, 2015). Cette articulation s’est avérée heuristique et féconde ; elle a en effet contribué à encourager (et à persévérer dans) deux orientations : a) concevoir un laboratoire original s’appuyant sur un mode inédit de recueil de données dans un temps long ouvrant l’opportunité de reconstituer des cours de vie, notamment par le biais d’une interprétation indexée au cadre sémiologique de Peirce (Theureau, 2004), b) rendre intelligible la manière dont les environnements font dispositifs par un processus circulaire d’apprivoisement apprenants/environnements en tissant les concepts de configuration d’apprentissage et de dimension instrumentale.
Deux points d’ancrage théorique
Le concept de configuration
Inspiré des travaux de Norbert Elias (1970), le concept de configuration permet de rendre compte des dynamiques à l’œuvre dans le cadre de structures relativement stables (Albero, 1998, 2010a, 2014, 2018). Ainsi, la délimitation de cinq composants (organisation, ressources matérielles, ressources humaines, publics, contenus de formation) qui structurent tout environnement de formation permet de décrire les instances qui interviennent, leurs fonctions, leurs interactions, les traces de leur activité, etc. (ibid.). En les plaçant en tension entre deux pôles opposés (instruction/autonomie en référence aux travaux de F. Varela), il est possible d’analyser, mais aussi d’expliquer, voire de prédire les jeux de tension entre les composants à l’intérieur du même environnement de formation (ibid.) (fig. 1, ci-dessous).
Figure 1 : Configuration d’activité (Albero, 1998, 2010a, 2014, 2018)
Cet ensemble conceptuel montre que ce qui fait dispositif, en instrumentant les apprentissages, organise des configurations d’activité sur un continuum en tension entre les deux pôles de l’instruction et de l’autonomie. La validation interne et externe sur une diversité de terrains d’enquête permet de stabiliser une typologie mettant en évidence les diverses dominantes repérables sur ce continuum (fig. 2, ci-dessous).
Figure 2 : Typologie des dispositifs de formation selon le paradigme d’inscription et leur visée (Albero, 1998, 2010b, 2014)
Le concept de dispositif
L’approche sociotechnique en formation étudie ce qui, dans un environnement fait dispositif pour les acteurs selon une acception ternaire et trilogique. En prenant ses distances avec la notion de sens commun (Albero, 2010b), un étayage théorique et empirique a permis d’élaborer une modélisation constituée de trois dimensions en interaction permanente, et sous-tendues par trois logiques d’activité (ibid., 2010b, 2011, 2018) (fig. 3, ci-dessous) :
Figure 3 : Modèle ternaire et trilogique (Albero, 2010b, 2011)
1) L’idée relève des idées, principes, modèles et valeurs qui orientent et structurent les décisions, actes et discours des acteurs ; cette dimension est sous-tendue par une logique épistémo-axiologique (en référence aux travaux de M. Godelier et H. Putnam) qui oriente l’activité en reliant les modèles explicatifs du monde et les systèmes de valeurs qui leur sont attachés.
2) Le fonctionnel de référence relève de la mise en acte pratique et du projet opérationnel explicité dans les discours, les textes et documents (définitions, planifications, étapes, évaluations) ; il constitue le pivot central de l’ingénierie qui organise, contrôle et régule le fonctionnement global, la référence pragmatique normative qui permet d’évaluer les résultats, non seulement par rapport au projet/projections (idéel), mais aussi aux réalités pédagogiques, économiques et matérielles du moment ; cette dimension est sous-tendue par une logique instrumentale (en référence aux travaux de J. Habermas) qui organise l’activité en se centrant sur le rapport but-moyen selon une finalité d’efficacité.
3) Le vécu des acteurs (décideurs, enseignants, techniciens, étudiants, etc.) relève des aspects socio-émotionnels liés aux système d’interactions et aux négociations permanentes à l’œuvre dans l’action individuelle et collective telle qu’elle se déroule au quotidien selon leur histoire, leurs aspirations et dispositions propres, mais également leurs statuts et leurs rôles ; elle est sous-tendue par une logique intersubjective et existentielle (ou communicationnellechezJ. Habermas et en référence aux travaux d’A. Schütz) qui anime l’activité en se centrant sur le rapport engagement-résultat selon une finalité de lien social.
Les trois dimensions et leurs logiques sous-jacentes sont considérées comme étant mobilisées de manière simultanée par les sujets et les collectifs, orientant ainsi la dynamique d’une tendance générale qui finit par faire dispositif (c’est à dire qui opère..., transforme…, stimule …), de manière constitutive et non pas occasionnelle ou accidentelle (ibid.).
Fécondité des deux ancrages théoriques
Le concept de configuration a été ici particulièrement opérant pour rendre compte de ce qui, dans l’environnement de formation proposé par M@gistère [2]diffère ou évolue, dans une structure qui, elle, reste relativement stable. Ce modèle nous a aussi permis d’élargir notre propos initial pour décrire et interpréter la configuration d’enseignement du PE dans sa classe. Ce cadre conceptuel s’appuyant sur la modélisation des configurations d’activité présentées (composants et variabilités sur les continuums), les résultats de l’approche exploratoire et les premiers résultats de l’enquête méthodique ont permis, à partir d’un processus de typification, de construire la matrice de configurations d’apprentissage en lien avec les profils des PE. Chaque matrice est ainsi constituée de cinq aspects significatifs du point de vue du participant : figure du professionnel, représentation de l’action professionnelle, culture du métier, conception du métier, conception du savoir. Chacun de ces aspects se manifeste entre deux pôles de tension, respectivement : a) sachant / passeur ; b) intervenant / accompagnant ; c) conformité / transgression ; d) réplication / invention ; e) réification / processus social (fig. 4, ci-dessous)
Figure 4 : Constituants non homogènes définissant une configuration d’apprentissage
Quant au concept de dispositif, il nous a permis de focaliser dans l’enquête conduite, l’analyse des interactions entre l’instance de formation (concepteurs et animateurs) et les apprenants à l’aune de l’approche ternaire et trilogique permet de repérer les congruences et divergences des attentes, des préoccupations, des engagements.
La formation continue des professeurs des écoles
Depuis 2013, un nouvel environnement de formation a été mis en place par le ministère de l‘éducation dans le cadre du plan numérique pour l’école. Ce nouvel environnement hybride, M@gistère, implique articulation de présentiel, de distanciel (synchrone ou asynchrone [3]), de pratique dans la classe. Ainsi sur les dix-huit heures de formation obligatoire, neuf heures de formation sont réalisées dans le cadre de M@gistère au travers de parcours de formation thématiques.
Une définition et des questions
M@gistère constitue une offre de e-formation s’adressant aux enseignants du premier et du second degré. Son introduction pose au moins quatre questions relatives à : a) la capacité des usagers à utiliser les outils numériques, ne serait-ce que du point de vue technique ; b) la capacité des PE à être autonomes, tant vis-à-vis des choix de contenus que vis-à-vis des temps (moments et durée) et lieux de connexion ; c) le type de transformation que peuvent susciter de tels environnements de formation et les compétences ou dispositions inhérentes à une exploitation optimale de ces outils ; d) la circulation des connaissances et leur éventuelle érosion ou stabilisation entre les moments solitaires face à l’écran [4], les moments d’échange par écrit ou de vive voix, la pratique de la classe.
Contraintes, ressources et fonctionnement
Chaque parcours varie dans sa durée (entre 3 et 9h.), mais peut également varier dans son contenu ou ses modalités de travail car chaque formateur ou équipe de formateurs peut adapter l’offre dans une phase dite de contextualisation. Les modalités pédagogiques peuvent alterner des temps de présence et des activités à distance (analyse de séquences pédagogiques, vidéos, classes virtuelles, préparation collective de séquence, exercices d’auto-évaluation, etc.) [5]. La répartition de cette alternance (figure 5, ci-dessous) est en partie décidée par les concepteurs, mais elle peut aussi être ajustée par les animateurs du parcours, lors de la phase de contextualisation. La part du présentiel peut aussi être totalement supprimée, faisant de M@gistère une simple plateforme de e-learning.
Figure 5 : Exemple d’organisation d’un parcours M@gistère
Problématique socio-professionnelle
La mise en place d’une telle modalité de formation bouleverse les habitudes de travail des PE car former à distance à et dans un métier de contact et de lien social est pour le moins paradoxal, ce qui n’est pas sans conséquences dans le quotidien des enseignants sur plusieurs plans.
Les interactions en formation nécessitent d’être vécues de manière incarnée dans la mesure où la dimension affective, biographique, sensible (voire sensorielle) des savoirs (Barth, 1993) les rend bien plus intelligibles quand leur négociation se fait à portée de voix. Cette part incarnée de la relation formateurs / formés est fortement revendiquée tant par les PE qui évoquent le besoin de sortir leurs préoccupations de la classe que par les conseillers pédagogiques du 1er degré (CPC – formateur) qui redoutent d’être perçus comme des spécialistes dans une tour d’ivoire. Ces évolutions interrogent également le rapport au numérique de ces professionnels qui peuvent avoir le goût de l’utiliser dans leur usage quotidien mais pas nécessairement dans le contexte de leur formation continue, en lieu et place d’une formation présentielle. Cela interroge également quant à la standardisation de parcours qui peuvent paraître uniformes dans leur conception, alors que les besoins des professionnels peuvent être aussi divers que spécifiques.
La documentation de l’activité effective des PE sur l’ensemble du parcours (présentiel et à distance / synchrone et asynchrone) a nécessité la conception d’un observatoire adapté au terrain d’étude et à la question de recherche, à savoir le caractère hybride et la durée de la formation. Celui-ci se présente à la fois comme un ensemble de moyens et de méthodes au service de la recherche et le lieu de construction des matériaux empiriques relatifs à l’activité des informateurs engagés dans l’environnement de formation.
Ce contexte a nécessité l’élaboration d’outils méthodologiques s’inscrivant dans la continuité d’observatoires conçus lors d’enquêtes scientifiques sur divers terrains : composition d’œuvre musicale (Donin, Theureau, 2008) ; personnes ayant une ou des maladies chroniques (Guérin, Zeitler, 2017) ; formation des apprentis-architectes (Watteau, 2017) ; construction de compétences sociales (Manach, 2019).
L’investigation a dû adapter les principes méthodologiques relatifs au cadre théorique de référence, tout en s’adaptant à certaines caractéristiques du terrain, notamment par la conception d’outils spécifiques dans le cadre de la relation de coopération avec les PE participants. L’objectif consistait à documenter l’activité des PE sur la plateforme à distance. Cette activité est déclenchée à la seule initiative du PE et ne répond qu’à ses propres nécessités professionnelles et libertés personnelles afin de ne pas être parasitée par les impératifs de la recherche.
Etape exploratoire
Dans un premier temps un questionnaire a été envoyé à une centaine de professeurs des écoles sur tout le département du Finistère. Ces professeurs des écoles ont des statuts divers (adjoint, directeur-trice, formateurt-rice…) et sont des circonscriptions différentes avec des suivis de e-formateurs différents. Le questionnaire était composé de trois parties : une première en lien avec des questions générales sur le métier, la seconde sur la formation continue et son évolution et enfin la dernière partie sur l’environnement de formation M@gistère. Ces dires sur leur activité nous ont permis à la fois de délimiter notre objet de recherche et d’identifier des participants à cette recherche, par une analyse textuelle à l’aide d’un logiciel pour les analyses multidimensionnelles de textes et de questionnaires.
Choix des participants pour cette étude
Notre objectif étant de rendre compte en continu (ou longitudinalement) de la construction de l’expérience des PE dans le cadre de cet environnement de formation.
Les participants à cette recherche ont été retenus au regard de leur utilisation régulière de la plateforme. Il est proposé une catégorisation de ces trois cas contrastés au regard des différents portraits. Cette catégorisation, à portée locale et exploratoire, est de nature inductive. Sur les 50 PE sollicités lors de l’enquête exploratoire, seulement 10% (autrement dit 5 PE) utilisent régulièrement M@gistère et expriment une satisfaction en relation avec la formation hybride, telle qu’elle est actuellement proposée. Même si aucune donnée officielle n’est disponible sur le taux de connexion des PE, ce résultat concorde néanmoins avec l’expérience de nombreux e-formateurs qui constatent une très faible fréquentation des parcours.
Le nombre de sujets sur lequel peut porter l’enquête s’avère donc extrêmement restreint, puisque celle-ci vise à observer, décrire et analyser l’activité de PE en situation de connexion à la plateforme. Les trois PE qui ont finalement participé à cette recherche représentent chacun un type particulier d’une catégorisation qui n’est ni exhaustive, ni fermée. Dans ces circonstances, l’enquête s’est focalisée sur ces trois sujets au profil contrasté, ayant déclaré une activité effective et significative sur les parcours de formation de la plateforme. L’enquête a été associée à une attention portée à la transformation de leurs pratiques professionnelles (tableau 1, ci-dessous).
Tableau 1 : Caractéristiques des sujets de l’enquête
Construction des matériaux empiriques
Parmi d’autres outils de recueil de données qui ont été utilisés pour documenter les significations relatives à la construction du cours de vie des participants lors d’un suivi longitudinal tout au long de l’année scolaire, nous avons privilégié le carnet et le logiciel de capture d’écran (CaptEcran) qui permettaient de recueillir a posteriori des traces d’activité et de conduire une série d’entretiens de remise en situation (Donin & Theureau, 2008 ; Theureau, 2010).
Le carnet de recueil de traces de l’activité présentait les différentes rubriques en termes de questions définies en référence à la théorie de Pierce concernant la catégorie de l’expérience. 1) l’engagement ou ouverture de possibles avant ou pendant l’atelier (Que souhaitiez-vous faire ? Qu’est-ce que vous attendiez ?) ; 2) Les actions, communications, focalisations, sentiments au cours de la séance (Que faisiez-vous ? Qu’est-ce que vous ressentiez ?) ; 3) les changements potentiels (Qu’est-ce que vous avez retenu ? Qu’est-ce que cela vous a fait ?). Ce carnet comportait aussi un diagramme concernant la dynamique émotionnelle (Ria, Chaliès, 2003) qui a permis de documenter l’évolution des émotions durant les temps de connexion en lien avec l’activité des participants.
La mobilisation de ces outils a permis de construire des traces visant a posteriori à documenter les différentes échelles macro-, méso- et micro- lors d’un entretien de remise en situation (Donin & Theureau, 2008). La construction de l’expérience est ici conçue comme un processus de transformation permanent et progressif faisant passer une expérience potentielle (priméité), en une expérience actualisée, (secondéité), s’achevant dans une construction de nouveaux possibles (tierceité) stabilisés dans de nouvelles habitudes.
Entretiens de remise en situation post-formation
L’objectif des entretiens est d’accéder aux significations construites lors de l’activité de connexion, afin de renseigner la construction de l’expérience du participant [6]. Cette dernière consiste en une dynamique du couplage structurel de l’acteur avec son environnement, ou encore en une succession ou un flux d’interactions asymétriques entre cet acteur et cet environnement. Ces interactions sont qualifiées d’asymétriques au sens où l’organisation interne de cet acteur à chaque instant sélectionne ce qui, dans l’environnement, est susceptible de le perturber et façonne la réponse qu’il peut apporter à cette perturbation, réponse qui transforme conjointement cette organisation interne et cet environnement. « La méthode d’entretien de remise en situation par les traces matérielles, c’est-à-dire les traces des transformations successives de la situation ou des œuvres, se situe dans le prolongement des principes et de l’expérience de l’auto-confrontation » (Theureau, 2010).
Traitement des données
Grâce à l’articulation de deux cadres théoriques principaux qui conduisent à mobiliser différentes échelles d’observation et d’analyse (macro, meso, micro), nous avons pu analyser l’activité sur un temps long de PE se connectant à une plateforme et en repérer les moments signifiants de leur point de vue pour comprendre les influences réciproques entre environnement de formation, plateforme et sujets. L’ensemble de cette phase s’est organisée en six étapes distinctes mais reliées :
Cette variabilité des constituants a pu ainsi permettre lors d’une dernière étape de définir des configurations d’apprentissage en lien avec un profil de PE. La méthodologie décrite jusque-là a permis d’identifier ce qui fait dispositif (Albero, 2010a/b) sur le continuum entre instruction et autonomie (ibid., 1998, 2014, 2018) du point de vue de chaque PE afin d’expliciter des énoncés de connaissance suffisamment valides pour servir de point d’appui à une généralisation personnelle ultérieure.
Précisions concernant la méthode d’enquête
Suite au questionnaire exploratoire, les trois PE sélectionnés ont été contactés par courriel puis par téléphone pour convenir d’une rencontre dans leur école.
Ce temps d’échange sur le principal terrain de leur activité professionnelle visait à leur préciser les conditions de la coopération en recherche (durée, contraintes, droit de retrait, devoir de confidentialité, cadre éthique), ainsi que la démarche adoptée, les outils techniques mobilisés (carnet, logiciel de capture d’écran, tutoriel d’installation) et les différents protocoles (modalités de connexion, entretiens de remise en situation, outils de suivi). Il a aussi permis de répondre à leurs interrogations et demandes d’explications complémentaires.
L’enquête a nécessité la conception d’un observatoire visant à construire des matériaux empiriques. Dans un premier temps, dans le cadre d’échanges informels, il s’est agi de questionner les PE à propos du/des parcours qu’ils avaient choisi(s) et d’obtenir des informations relatives à leur intention de formation (est-ce que ces parcours répondent à des préoccupations professionnelles ? Font-ils partie de ceux qui ont été imposés ou ont-ils été librement choisis ?). Dans un deuxième temps, s’est posée la question du temps de formation à distance investi par chacun des enquêtés dans le cas de la formation M@gistère. Il s’est alors agi de savoir quand et combien de temps ils se sont connectés, mais aussi de repérer si cette activité est discontinue et fragmentée ou au contraire massée. Enfin, il est apparu pertinent de savoir dans quelle mesure et pour quelles raisons certains espaces (lieux matériels ou numériques) sont plus investis que d’autres. Les préoccupations qui ont orienté l’enquête auprès de ces trois sujets étaient subordonnées à la question de recherche qui porte sur la compréhension de l’activité déployée dans le cadre d’une formation hybride, notamment sur la manière dont les acteurs s’approprient les différents espaces de formation proposés.
Dans la mesure où cette étude mobilise une documentation qui s’appuie sur l’objet théorique du cours de vie relatif à un projet de formation, l’observatoire a été soumis aux exigences des principes épistémologiques du cours d’action (Theureau, 2015).
Plusieurs outils de recueil de données ont été utilisés pour documenter les significations relatives à la construction du cours de vie des participants lors d’un suivi longitudinal tout au long de l’année scolaire, notamment un carnet et un logiciel de capture d’écran (CaptEcran) qui ont été privilégiés car ils ont permis de recueillir a posteriori des traces d’activité et de conduire une série d’entretiens de remise en situation (Donin, Theureau, 2008 ; Theureau, 2010).
Cette partie propose une synthèse des résultats les plus saillants et le repérage de ce qui fait dispositif (Albero, 2010) dans l’environnement de formation de type M@gistère dans lequel les PE ont été immergés.
Chacun des trois cas contrastés présentés dans cette recherche a été caractérisé sous la forme d’un portrait et d’une dénomination s’appuyant sur des caractéristiques saillantes. La première (cas n°1), PE adjoint connecté est une PE adjointe qui utilise les technologies du numérique pour son usage personnel et professionnel et dont une des préoccupations principales est la recherche de formation qui lui offre plutôt du clef en main. La seconde (cas n°2), PE maître-formateur orienté apprentissage, est une PE formatrice dont une des préoccupations principales porte sur les apprentissages scolaires et la manière de les rendre plus efficients. Enfin, le troisième (cas n°3), PE maître-formateur orienté formation, est un PE formateur dont une des préoccupations principales est l’optimisation de ses compétences en formation pour adultes.
L’étude se fonde sur l’hypothèse que si chaque sujet est singulier, il n’en révèle pas moins des conduites typiques tant au niveau du rapport au travail qu’à celui de la formation. Ainsi, si la plateforme participe de manière spécifique à l’instrumentation de chaque activité singulière, elle offre aussi des opportunités de transformation communes.
En s’appuyant sur les divers entretiens et sur le cours de vie des acteurs, la réflexion qui suit analyse les rapports acteur-environnement en termes de configuration d’apprentissage. Les résultats sont présentés sous forme de positionnement mobilisant les cinq constituants de la structure présentée précédemment et prennent en compte de manière dissociée l’activité de chaque participant dans sa classe (enseignant) et lors de sa confrontation à la plateforme (apprenant).
Le positionnement des différents indicateurs pour chacun des cinq constituants correspond à des tendances en fonction du contenu des réponses données lors des entretiens exploratoires semi-directifs. En aucun cas cela correspond à une échelle fine s’appuyant sur une mesure de ces indicateurs.
Exemple de traitement des données, pour le cas n°1 « PE Adjoint connecté »
Cette étape de la recherche est fortement détaillée pour cette PE (Aude), ensuite pour les deux autres cas il sera proposé directement les résultats. Il paraît nécessaire de montrer de manière rigoureuse l’utilisation de la méthodologie sur un des cas étudiés.
Dimensions dispositionnelles relatives à la formation
L’analyse du contenu des entretiens exploratoires a permis de repérer les opinions, les croyances des PE vis-à-vis du métier, son évolution au gré des réformes, leurs préoccupations professionnelles au moment de l’enquête scientifique.
Portrait synthétique de la participante (tableau 2 ci-dessous)
Aude enseigne depuis dix ans dont neuf en classe maternelle. Depuis un an elle intervient auprès d’une classe de CP/CE1/CE2. Elle enseigne plusieurs disciplines « J’ai la responsabilité d’enseigner à des élèves de 7 à 9 ans : la lecture, l’orthographe, la grammaire, la calligraphie, la numération, le calcul, la géométrie, l’anglais, les sciences, l’histoire, la géographie, le sport et l’éducation civique » (Extrait n°1 du questionnaire exploratoire)
Tableau 2 : Portrait synthétique de la PE (Aude)
Préoccupations professionnelles du moment
Différentes préoccupations professionnelles sont organisatrices de son activité d’enseignante.
Rendre les parents acteurs de la scolarité de leur enfant
Tout d’abord elle souhaite que les parents comprennent leur rôle et la place qu’ils peuvent occuper dans la scolarité de leur enfant : « Je dois aussi prendre en compte les parents et faire en sorte qu’on collabore pour le bien de leur enfant ». (Extrait n°2 du questionnaire exploratoire).
Être aidée pour gérer les élèves en difficultés
Elle se dit peu épaulée dans la gestion des élèves en difficultés : « Ce n’est que ma 2ème année en élémentaire mais je n’ai pas souvenir d’avoir été si peu aidée à gérer les difficultés de mes élèves. La rareté du RASED n’aide pas… » (Extrait n°3 du questionnaire exploratoire).
Rester seulement responsable de sa classe
Enfin elle déplore le fait qu’en tant que PE elle ait à gérer les AVS (Auxiliaire de Vie Scolaire) présentes dans sa classe pour accompagner les élèves en difficultés (dont la difficulté a été reconnue par la MDPH – Maison Départementale du Handicap – et qui a donc débouché sur l’affectation d’une personne pour accompagner cet élève dans ces apprentissages) : « […] mais la gestion des AVS est parfois très compliquée…on devient responsable d’un adulte qu’il faut former, conseiller et évaluer… » (Extrait n°4 du questionnaire exploratoire)
Vécu relatif à l’usage de la plateforme M@gistère
Aude connaît et utilise la plateforme de formation depuis deux ans. Elle suit des parcours en autoformation et aussi des parcours imposés dans le cadre du temps de formation obligatoire des PE : « C’est une plate-forme de formation sur internet. Les inscriptions peuvent être libres ou imposées par l’IEN. Toutes sortes de formations sont proposées ». (Extrait n°4 du questionnaire exploratoire)
Elle repère des éléments positifs et négatifs à cette modalité de formation : « Pour ce qui est du côté positif : le côté interactif, la liberté de gérer son temps… Pour ce qui est du négatif : le fait que certaines formations soient imposées et que l’avancé dans le module puisse être surveillée… » (Extrait n°5 du questionnaire exploratoire)
Elle explique et justifie sa participation à un parcours. Cela dépend de sa première connexion et de son analyse rapide du menu proposé. En fonction de cela, elle s’engage de manière immédiate dans la navigation (adaptée) du parcours. Sinon elle remet à plus tard sa participation. « Je l’ouvre et je survole le menu. Si ça me plait, je le fais, je ne m’attarde qu’au contenu qui m’intéresse. Si ça ne me plait pas, je reviens plus tard et je fais défiler ». (Extrait n°6 du questionnaire exploratoire)
Elle décrit aussi son activité sur la plateforme en fonction de son appréciation de la perception de la qualité du parcours. Selon que le parcours l’intéresse ou pas elle déploie tel ou tel type d’activité. « Je lis (tout si ça m’intéresse, en diagonale si ça ne m’intéresse pas), je regarde les vidéos (tout si ça m’intéresse, en partie ou en pointillé si ça ne m’intéresse pas), je fais les QCM au hasard. Je participe rarement au forum lié au parcours (sauf si j’y trouve un intérêt) ». (Extrait n°7 du questionnaire exploratoire)
Contraintes personnelles
Le temps de formation liée à la formation hybride M@gistère est comptabilisé à la hauteur de 9h dans le temps obligatoire de 18h de formation continue des PE [7]. Avec la mise en place de cette nouvelle modalité de formation les 9h dédiées sont, pour la partie à distance, à l’appréciation des PE. C’est à eux d’organiser leur temps. Ceci amène une nouvelle problématique de gestion de son temps professionnel en dehors des heures de classe. Aude, comme ses collègues, doit organiser son temps et tenir compte du coup de contraintes personnelles. Cela a des conséquences sur ces moments de connexion et son temps de connexion. Toute cette partie sera bien sûr analysée de manière beaucoup plus précise par la suite notamment dans le cadre du cours d’action et du cours de vie relatif à la connexion à un parcours M@gistère sur un temps long. Les éléments ci-dessus, sont des dires sur son activité. Ils permettent tout de même de documenter des premiers éléments liés à ses préoccupations et son engagement dans cette modalité de formation.
Elle privilégie des moments de vacances le soir après avoir couché ses enfants. Cependant les échéances la rattrapent parfois, en raison du positionnement de présentiel qui nécessite une connexion en amont à la plateforme, soit pour consulter des ressources ou bien pour préparer une séance en classe.
Ce paramètre des contraintes extérieures et personnelles est un point à prendre en compte en termes de disponibilité à s’engager dans une formation et à se connecter à un parcours à distance.
Analyse des environnements de formation suivis par Aude
Aude a participé durant son année scolaire à deux parcours de formation M@gistère : Résolution d’énigmes mathématiques et La démarche d’investigation au cycle 2. Aude n’a pas eu le choix de ces parcours. Elle les a choisis dans une liste imposée dans le cadre du plan de formation décidé et organisé par l’équipe de la circonscription (IEN et CPC) au regard des orientations nationales et des spécificités relevées par cette même équipe par rapport à leurs observations du terrain. Son premier choix s’est arrêté sur le parcours Résolution d’énigmes mathématiques, car elle désire mettre en place ce type de situations dans sa classe à plusieurs niveaux. Pour le second parcours, c’est plutôt par élimination qu’elle s’y est inscrite.
Organisation du parcours « Résolution d’énigmes mathématiques »
Le parcours hybride s’organise en deux étapes (figure 6, ci-dessous). La première étape est à distance de manière asynchrone. Le participant aura des apports sur la définition des énigmes mathématiques, sur les références aux programmes de l’école. Il sera aussi amené à visionner des vidéos de mise en œuvre dans la classe. Enfin pour conclure cette étape et afin de préparer le présentiel, les participants sont invités à mettre en place une séance sur la résolution d’énigmes mathématiques dans leur propre classe.
Figure 6 : Forme d’hybridation du parcours Résolution d’énigmes mathématiques
Organisation du parcours « La démarche d’investigation au cycle 1 et 2 »
Ce parcours hybride s’organise aussi en une seule étape (figure 7, ci-dessous). Elle est à distance de manière asynchrone. Le participant aura des apports sur la démarche d’investigation en sciences, sur les références aux programmes de l’école. Durant cette partie du parcours il sera aussi amené à visionner de nouveau des vidéos de mise en œuvre de cette démarche dans la classe. Il devra analyser différentes vidéos concernant les différents cycles de l’école. Il est ensuite invité à mettre en œuvre un des exemples proposés dans le cadre de sa classe. Cette organisation correspond de nouveau à l’exemple.
Figure 7 : Forme d’hybridation du parcours La démarche d’investigation au cycle 1 et 2
Cas n°1 (PE adjoint connecté) : une configuration de formation instable assujettie à la configuration d’enseignement
Afin de favoriser une lecture comparative, la présentation des deux configurations (la classe, la formation) qui suit les tableaux se déploie de manière à proposer une lecture en parallèle de la justification et de la dynamique des constituants de la structure pour chaque configuration.
Figure 8 : Configuration d’enseignement (tableau de gauche) et configuration d’apprentissage (tableau de droite) concernant la PE au profil Adjoint connecté
De la configuration d’enseignement à une configuration de formation
La figure du professionnel
Face à la plateforme, la recherche des situations où les élèves vont se poser des questions (énigmes mathématiques, défi scientifique) est contrebalancée par la difficulté, dans son enseignement, à proposer ce type de situations et à les éviter. Ce conflit intrapersonnel en suspend positionne cependant davantage l’enseignante vers le pôle de passeur, le réalisme atténuant sans les éteindre les ambitions portées par sa conception de l’apprentissage.
La représentation de l’action professionnelle
L’oscillation entre les deux pôles intervenants et accompagnant est dépendante des caractéristiques des situations qu’elle souhaiterait proposer et de la maîtrise des configurations de classe qu’elles génèrent ou généreraient. Ce positionnement homogène peut traduire une projection de la plateforme vers la classe qui intègre peu une perspective de transformation.
La culture du métier
Ce grand écart des configurations correspond à la juxtaposition, d’une part d’une préoccupation en termes de conformité qui se concrétise par la recherche d’une stricte application des prescriptions et, d’autre part à une posture qui, paradoxalement, se veut réfractaire aux injonctions hiérarchiques. La volonté de transgression qui se manifeste en situation de formation, en périphérie, ne se concrétise pas dans la classe.
La conception du métier
Chez cette enseignante, ce constituant qui traduit davantage son activité sur la plateforme que son bagage culturel évoqué précédemment se présente de manière très homogène et traduit une posture conservatrice pour laquelle les possibles ne le sont que s’ils ne remettent pas en cause les certitudes empiriques, c’est-à-dire quand ils sont faits de réplication à partir de ressources fournies clef en main.
La conception du savoir
Sur cet objet on peut de nouveau constater une différence entre l’enseignante et l’apprenante. Dans le premier cas, elle mobilise une conception du savoir qui serait plus proche de la réification [8] alors que dans le deuxième cas, elle serait préoccupée par les processus sociaux qui organisent les apprentissages envisagés. Cette préoccupation, sans doute favorisée par sa maîtrise des contenus disciplinaires dont elle se sent libérée, peut aussi émerger de la prise de conscience des remises en causes personnelles (notamment en termes de gestion de la classe) imposées par les innovations proposées.
Une configuration de formation propice à l’engagement de la « PE connecté »
Ces deux constats (attente d’un ancrage concret sur ses pratiques professionnelles, voire sur ses routines, et réticence à la prise de risque) laissent penser que l’enseignante accepte de persévérer dans une formation à condition que celle-ci lui offre un espace d’action encouragé (Durand, 2008) où les dimensions Informatives, Méthodologiques et Psycho-Affectives (Albero, 2003 ; Albero et Nagels, 2011) sont investies par les concepteurs du parcours en termes d’instrumentation.
Cas n°2 (PE maître-formateur orienté apprentissage) : une configuration de formation qui se rapproche d’une configuration d’enseignement
De la configuration d’enseignement à une configuration de formation
Pour ce nouveau cas, la réflexion qui suit analyse de nouveau de la même manière que précédemment les rapports acteur-environnement en termes de configuration d’apprentissage.
Figure 9 : Configuration d’enseignement (tableau de gauche) et configuration d’apprentissage (tableau de droite) concernant la PE au profil Maître-formateur connecté orienté apprentissage
Les tableaux ci-dessus qui proposent une configuration d’activité de la PE comme enseignante puis comme apprenante permettent de la situer entre instruction et autonomie en fonction de la situation vécue, mais avec une plus grande tendance vers le second pôle dans les deux cas de figure. Cette situation globale relativement homogène synthétise les différents positionnements associés à chaque constituant analysé comme suit :
La figure professionnelle
Désireuse de mettre en œuvre des situations qui permettent à la fois de mettre les élèves dans une position où ils se posent des questions et de prendre en compte l’hétérogénéité de la classe, cette enseignante présente un profil de type passeur. Cette posture qui se manifeste de manière aussi assurée dans son expérience d’enseignante que dans celle d’apprenante relève d’une forte cohérence interne dont on peut penser qu’elle témoigne aussi d’un équilibre qui articule en outre son confort et son sentiment d’efficacité dans la classe.
La représentation de l’action professionnelle
On peut penser que l’exercice de sa mission de maître-formatrice et son habitude à enseigner en CM lui permettent d’exprimer dans son activité d’apprenante des dispositions qui la rendent plus proche du pôle accompagnant, pôle qu’elle doit mobiliser dans ses propres formations. Cette homogénéité de la posture entre les activités d’enseignante, d’apprenante et de formatrice témoigne une fois encore d’une forte cohérence interne qui favorise sa disposition à rester en phase avec les exigences et les propositions du parcours M@gistère qu’elle a suivi.
La culture du métier
Sur ce constituant de la configuration, l’enseignante oscille entre conformité et transgression. Si, en tant que formatrice, son engagement témoigne du souci de respecter les programmes et de s’attacher à réfléchir sur les thématiques du moment (rendre les élèves chercheurs, gérer l’hétérogénéité au sein de la classe …), elle est aussi parfois attirée par des démarches innovantes ou inédites pour elle. Ce positionnement est le fruit d’une tension entre sa conscience professionnelle qui l’incite à respecter des prescriptions qui vont au-delà du cadre institutionnel et ses convictions personnelles, identitaires qui la portent sur le versant de l’audace et de la curiosité.
La conception du métier
À mi-chemin entre réplication et invention, cette PE se retrouve souvent en attente d’exemples concrets déjà testés tout en étant capable de les adapter au contexte de sa classe et à sa manière d’enseigner. Son besoin d’ancrage dans une communauté de pratiques (Wenger, 2005) se conjugue avec celui, fort bien maîtrisé, d’analyser, de modifier, de transformer et d’adapter des situations présentées par des pairs. Sa conception du métier s’incarne dans une dynamique d’affirmation de son style dans le genre professionnel (Clot, Faïta, 2001).
La conception du savoir
Plus proche du pôle processus social, cette enseignante recherche des démarches qui permettent aux élèves de se retrouver en situation d’apprentissage de type investigation pour mettre à l’épreuve leur capacité à réutiliser leurs compétences en toutes circonstances. Pour elle, le savoir relève d’un partage qui s’opère au travers des interactions entre enseignante et élèves et entre élèves eux-mêmes lors de situations pensées en ce sens. Le considérant comme le fruit d’un partage, elle estime aussi que le savoir se découvre, affirmant ainsi une conception qui articule intuitivement produit et processus.
Le tableau permet de positionner cette PE plutôt vers le pôle autonomie, même si son besoin d’avancer avec une certaine forme de sécurité se matérialise par une recherche constante de proximité vis-à-vis des formateurs. Les deux configurations d’apprentissage ci-dessus sont relativement identiques. Son style d’enseignement et la façon dont elle investit les formations ne diffèrent pas.
Une configuration de formation propice à l’engagement de la « PE maître-formateur connecté orienté apprentissage »
Les artefacts mis à la disposition de cette PE contribuent à sa compréhension de la logique de la formation proposée et favorisent son engagement, participant ainsi à l’instrumentation de son activité. Celle-ci relit par exemple les divers messages du formateur plusieurs fois pour bien identifier la commande et analyser la présentation du journal du nombre au regard de ses attentes et de son expérience professionnelle. Elle ne cesse de faire des aller-retours entre ce qui lui est proposé et la réalité de sa classe. Ces contenus doivent être clairs et favoriser une réelle avancée pédagogique pour qu’elle s’en empare. Ils doivent aussi répondre à la fois à son souhait d’immerger les élèves dans des situations où ils construisent leurs savoirs et leurs compétences et à celui d’être outillée pour organiser ces nouvelles situations.
La dynamique des engagements qui se déploie dans une démarche d’enquête (Dewey, 1938) orientée sur la mise en œuvre d’un nouvel outil pédagogique conduit l’enseignante à s’inscrire à une formation susceptible de répondre à ses attentes et à son besoin d’innover, de faire autrement. Lors de ce nouvel épisode, elle évalue tout d’abord les contenus proposés à partir des deux critères que sont, pour elle, la cohérence conceptuelle et le réalisme, la faisabilité. Dans un second temps, elle sélectionne les documents qui l’accompagnent à un rythme lui permettant d’analyser progressivement les possibilités qu’ils offrent tout en ayant la liberté de poser des questions d’élucidation au formateur. Cette démarche qui traduit le refus de se lancer d’emblée dans l’expérimentation peut être qualifiée de prudente dans la mesure où elle privilégie une stratégie des petits pas. Elle préfère en effet installer la démarche du journal du nombre dans sa classe en l’adaptant à sa propre progression en termes de compréhension de l’outil, et aux étapes prévues dans la programmation de son enseignement des mathématiques. Cette possibilité pour elle d’actualiser sa volonté de se transformer sans prendre le risque de mettre ses élèves en situation de difficulté, ni de se retrouver elle-même dans l’inconfort face à ses élèves, lui permet de vivre son parcours comme une expérience déployée sur un fond d’espace d’action encouragée (Durand, 2008) stimulant les dimensions Informatives, Méthodologiques, Cognitives, Métacognitives et Psycho-Affectives (Albero et Nagels, 2011) de son activité.
Cas n°3 (PE maître-formateur orienté formation) : une configuration de formation qui laisse une liberté d’expérimenter de manière autonome
De la configuration d’enseignement à une configuration de formation
Pour ce troisième cas, la réflexion qui suit analyse de la même manière que précédemment les rapports acteur-environnement à partir des constituants de la configuration d’apprentissage en se fondant sur les entretiens de remise en situation et sur les données recueillies lors des temps de connexion.
Figure 10 : Configuration d’enseignement (tableau de gauche) et configuration d’apprentissage (tableau de droite) concernant la PE au profil Maître-formateur connecté orienté formation
Le tableau permet de positionner ce PE davantage vers le pôle autonomie tendance qui est plus affirmée dans la configuration de formation. Il laisse aussi apparaître une certaine hétérogénéité sur la culture du métier, et la conception du savoir.
La figure professionnelle
Son besoin souvent affirmé de maîtriser les contenus de sa formation ainsi que ses interventions systématiques par le biais de la plateforme (autant pour faire avancer la réflexion collective que pour montrer son niveau de connaissances et de maîtrise des outils), positionnent ce PE à proximité du pôle sachant. Ce positionnement est confirmé par les entretiens, durant lesquels il n’a cessé de soutenir que les différentes ressources ne lui apportaient pas plus que ce qu’il savait déjà, même s’il justifiait la mobilisation de certaines de ses connaissances ou compétences en se référant à des apports du parcours [9]. Peu enclin à accepter les vertus des échanges contradictoires, cet enseignant a parfois rencontré des difficultés à respecter un cahier des charges favorisant les interactions. En certaines circonstances, son engagement semble en outre motivé par le souci de faire valoir ses connaissances auprès des formateurs [10].
La représentation de l’action professionnelle
Sur cette composante enseignement de la configuration, il se situe à mi-distance des pôles intervenant et accompagnant [11]. Si sur ce versant de la formation, ses représentations le feraient plutôt tendre vers le pôle accompagnant, en action, il veut avoir la main sur les événements et impose sa manière de voir les choses et d’appréhender les situations. Dans le travail de groupe, par exemple, il propose le cadre de l’analyse sans même envisager de le négocier avec sa collègue. Il en va de même pour le cadre imposé pour la restitution qui, ne lui convenant pas, le pousse à laisser sa collègue le compléter pour se donner la liberté de créer lui-même la classe virtuelle [12]. Ces épisodes incitent à le positionner plutôt vers le pôle intervenant.
La culture du métier
Ce constituant laisse apparaître une divergence sensible dans son expression entre la configuration de formation où la transgression s’impose, et la configuration d’enseignement où il se laisse aspirer par la conformité sans cependant quitter la zone de transgression [13]. Ce positionnement est aussi perceptible dans non-prise en compte des injonctions institutionnelles (orientation des programmes, méthodes d’apprentissage fortement conseillées) [14].
La conception du métier
Dans les deux configurations et de manière homogène, la conception du métier se situe à proximité du pôle invention. Ce PE, qui n’est pas en recherche de situations clef en main, est davantage séduit par des situations qu’il peut lui-même expérimenter, mettre à l’épreuve [15]. De plus, il sait en tirer parti pour enrichir son bagage de compétences et de connaissances qu’il articule ensuite selon sa vision de l’apprentissage et de l’enseignement. Sa maîtrise des usages du numérique lui offre de multiples possibilités de faire évoluer et diversifier sa pratique de classe pour répondre à des besoins identifiés, que ce soit pour son enseignement ou pour son encadrement de formations [16].
La conception du savoir
Il s’agit du second versant qui laisse apparaître une certaine divergence. Cette divergence s’exprime par une inclination qui le rapproche du pôle processus social en situation de formation et une tendance qui oscille entre les deux pôles réplication et processus social en situation d’enseignement. Elle témoigne du conflit intrapersonnel qui révèle ce PE en recherche de situations collaboratives et d’échanges correspondant à sa façon d’évoquer sa conception des apprentissages, mais qui a besoin d’avoir la main [17] quand il s’agit de l’incarner. Cette posture qui vaut tant pour les situations d’enseignement que pour les situations de formation, se donne à voir à la fois sur le parcours de formation et dans sa classe de CP.
Une configuration de formation propice à l’engagement de la « PE maître-formateur connecté orienté formation »
L’analyse des conditions d’instrumentation de son activité montre que les artefacts contribuent à lui offrir une grande liberté d’engagement. Il sait par exemple tirer parti de la possibilité d’explorer seul les différentes fonctionnalités de la classe virtuelle et apprécie cette liberté de manœuvre qui entre en adéquation avec ses traits dispositionnels (cf. 6.4).
La dynamique des engagements observée lors de ce parcours se déploie aussi autour de sa démarche d’enquête (Dewey, 1938). En effet, se questionnant sur ses propres compétences à prendre en charge des formations à distance, ce PE se met rapidement en quête de ressources, notamment en termes de gestion de groupe et de pilotage des interactions. Chez ce maître formateur, la démarche d’enquête est menée prioritairement à la nécessité de suivre les prescriptions du parcours, nécessité qu’il respecte cependant de loin en loin, et le plaisir de jouer avec certains outils.
Si l’environnement de formation semble, pour lui comme pour les autres participants, se présenter comme un champ d’action encouragée, les dimensions Informatives, Méthodologiques, Cognitives, et Métacognitives (Albero et Nagels, 2011) mobilisent son engagement sans que n’apparaisse la dimension Psycho-affective présente chez les deux autres apprenants. Cette absence confirme, par et dans l’action, la nature des traits dispositionnels évoqués au 6.4.
Un des objectifs principaux de cette étude est de documenter l’activité de PE confrontés à une plateforme de formation à distance et d’identifier ce qui fait dispositif (Albero, 2010b) en lien avec la matrice de configurations d’apprentissage selon les profils des PE. La conclusion propose une synthèse de ces résultats ainsi que des pistes praxéologiques en lien avec les résultats de l’étude.
Ce qui fait dispositif pour la « PE adjoint connecté »
L’analyse des configurations d’enseignement et de formation ce cette enseignante montre que celle-ci est tiraillée entre ses convictions et l’image qu’elle se fait de ses propres capacités à les incarner. Le dilemme qu’elle doit résoudre porte sur l’articulation entre ses cohérences internes (une intuition constructiviste des apprentissages) et les perturbations qu’elles pourraient provoquer quand elle les confronte, elle, à la réalité de sa classe (possible perte de contrôle des élèves, des apprentissages, des contenus…). Ce dilemme se donne à voir dans l’hétérogénéité que présentent ses deux configurations. Le fait que l’enseignante se positionne plutôt comme sachant du point de vue professionnel, qu’elle propose plutôt une posture visant la conformité quant à sa culture du métier et qu’enfin son engagement professionnel témoigne d’une conception du savoir résolument orientée sur le pôle de la réification peut expliquer certaines résistances quand elle est confrontée à des instants de surprise où elle perd pied et peut même se résoudre à la passivité. Cependant, son engagement dans le parcours a généré quelques effets positifs en termes de développement professionnel. Ces transformations témoignent du fait que quelques couplages ont pu faire dispositifs. Parmi eux :
Ce qui fait dispositif pour la « Maître-formateur connecté orienté apprentissage »
Dans le cadre de sa formation, cette enseignante est attirée par des situations d’enseignement innovantes qui favorisent la construction des savoirs et des connaissances de manière structurée par les élèves. Elle est sans cesse en train d’analyser la pertinence et l’adéquation à ses propres convictions de situations d’apprentissage novatrices ou de nouveaux outils pédagogiques.
Les attentes ce cette PE offrent en outre la particularité de produire une réflexion qui cherche à articuler de manière cohérente une visée et une vision trilogiques personnelles. La dynamique de ses attentes semble en effet être portée par le souci de rendre, ou de garder possible a) une ambition constructiviste pour les apprentissages de ses élèves [18], b) la prise en compte de ses élèves confrontés dans sa propre classe à ce qu’elle sait de son pouvoir d’agir [19] et enfin c) la nécessité de ne pas se mettre en danger [20]. Cette réflexion pragmatique qui mobilise intuitivement idéel, fonctionnel de référence et vécu (Albero 2010a), la rend capable, tout au long de la formation, de mesurer et d’anticiper l’impact que la mise en œuvre du journal du nombre va produire sur son organisation et sur sa posture. Les attentes de cette enseignante et sa capacité à se projeter dans sa classe pendant la formation l’ont conduite à construire une stratégie de transformation et d’adaptation réaliste lui permettant de tirer le meilleur parti de son parcours.
Ainsi, il apparaît que la configuration de formation qui favorise son engagement est une configuration offrant la possibilité de vivre des situations proches de la configuration d’enseignement. Ce parcours s’est en effet développé sur trois étapes enchâssées qui lui ont à chaque fois permis de questionner, expérimenter, valider/invalider des propositions de mise en œuvre à partir de son propre point de vue, c’est-à-dire du regard qu’elle porte sur ses propres ressources, sur son pouvoir d’agir. Celle-ci va dans un premier temps être mise en situation de partager le point de vue (Berthoz, 2004) d’élèves expérimentant, questionnant, validant les réponses lors de la résolution d’une énigme et pouvoir d’une part comparer cette situation à celles qu’elle propose à ses élèves et, d’autre part imaginer ses élèves dans ce contexte d’apprentissage nouveau et possible. Dans un second temps et parallèlement, l’enseignante se met en quête de vidéos susceptibles à la fois de la transformer et de la rassurer et met progressivement en œuvre dans sa classe des environnements d’enseignement intégrant les propositions qu’elle a retenues. On peut légitimement penser que la proximité de ces deux modes d’engagement favorise son développement, que ce soit en configuration d’enseignante ou en configuration d’apprenante. Dans la classe, elle lui permet de faire preuve d’une certaine audace en adaptant et en s’adaptant (c’est-à-dire initier une nouvelle démarche, même si c’est en tâtonnant) ; sur le parcours M@gistère elle favorise son anticipation, sa faculté de se projeter par mimétisme (pour opérer de manière autonome des sélections pertinentes). Cette articulation heureuse des deux situations la met en position de réussir progressivement sa propre mutation. À ces mises en situation favorisées par l’usage de l’image, des vidéos, s’ajoutent des activités de pré-scénarisations déclenchées par la mobilisation de ressources documentaires qui font écho à son propre engagement professionnel procédant elles aussi à une mise en situation de formation fortement ancrée sur ses propres scénarios pédagogiques.
Outre ces constituants de l’environnement favorisant l’engagement de cette PE, il convient d’ajouter la part prise par l’accompagnement humain. L’enseignante, par ses mails adressés à son e-formateur (soit pour se faire préciser certaines consignes ou indications ou encore pour se faire rassurer quant à ses interprétations, ses expérimentations), témoigne de la nécessité d’un accompagnement bienveillant, compréhensif, empathique auquel ne peuvent se substituer ni l’arsenal technologique mobilisé, aussi pertinent soit-il, ni la qualité des ressources mises à la disposition des apprenants.
Les dimensions d’instrumentation rencontrées dans l’analyse de l’activité de cette enseignante sont donc à la fois Méthodologique, Cognitive et Métacognitive. Non seulement celle-ci mobilise l’ensemble des indications et exemples qui lui sont proposés pour analyser la démarche du journal du nombre et la comparer à celle qu’elle met en œuvre mais elle repère aussi aisément les modifications et les évolutions à apporter à son enseignement. A ces trois dimensions s’ajoute une instrumentation psycho-affective qui l’incite à ne s’engager que si elle se sait accompagnée tant pour ne pas s’égarer que pour se voir rassurée quant à ses interprétations, ses décisions.
Ce qui fait dispositif pour le « Maître-formateur connecté orienté formation »
Son activité est dominée par des épisodes dans lesquels il manifeste une grande autonomie. Celle-ci se traduit par la conjonction d’actions qui visent et parviennent à la fois à poursuivre une quête d’informations susceptibles de participer à ses développements personnel et professionnel, et à se conformer aux prescriptions du parcours. Cette activité est encouragée par quelques caractéristiques saillantes de son environnement de formation :
Des parcours qui proposent et s’appuient sur diverses configurations d’apprentissage
Au sein d’un même parcours de formation, via M@gistère, il semble qu’il peut être proposé une organisation différente au regard des profils des PE qui s’y inscrivent. Cela passe par une identification des profils en fonction des configurations d’enseignement de chacun d’eux. Ceci pourrait se formaliser sous forme de tests de positionnement, en amont des parcours de formation, via un questionnaire ou des activités spécifiques qui positionnent le PE au regard des aspects significatifs des configurations d’apprentissage. Cela déboucherait sur des propositions d’activités ciblées et un accompagnement adapté de la part des e-formateurs.
Une plateforme qui permet une personnalisation des parcours
Une formation qui offre la possibilité d’organiser son parcours à sa main. Si le jeu est déclenché par l’expérience de l’étonnement (Thiévenaz, 2019), la nécessité de s’adapter aux attentes et préoccupations de chacun peut trouver une réponse par la conception de parcours organisés sous forme de cartes mentales. Une telle modalité pédagogique qui s’ouvrirait par une série de questions débouchant sur des fenêtres thématiques offrirait, d’une part un champ de possibles propre à générer une personnalisation des parcours initiée par les apprenants eux-mêmes, et d’autre part stimulerait la mobilisation d’une démarche d’enquête. Ces thématiques pourraient porter sur la mise en œuvre, les programmes, les didactiques disciplinaires, l’activité des élèves, les gestes professionnels.
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[1] Schéma directeur de la formation continue des personnels du ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports - 2022-2025 - Circulaire du 11-2-2022 / MENJS - DGRH F1 - DGESCO C1-2
[2] Dans le cadre de la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République du 8 juillet 2013 M@gistère constitue une offre de e-formation s’adressant aux enseignants du premier et du second degré, qui propose diverses modalités d’exploitation : accompagnements, hybridation en présentiel ou à distance, participation synchrone ou asynchrone, parcours à distance en autoformation.
[3] Les outils et ressources synchrones impliquent un environnement d’apprentissage dans lequel formateur et formés sont réunis simultanément à horaire précis, alors qu’ils se trouvent dans des lieux différents. Comme dans le présentiel, l’un anime en temps réel, les autres participent aux activités (classe virtuelle, audio ou visioconférence, clavardage, messagerie instantanée, etc.). À l’inverse, les outils et ressources asynchrones impliquent un environnement d’apprentissage dans lequel formateur et formés n’ont pas besoin d’être connectés au même moment. Les contenus liés à ces outils ou ressources peuvent être consultés au moment choisi par chacun et le formé peut suivre sa formation de façon individuelle (cours d’autoformation en ligne, tutoriels, blog, wiki, groupe de discussion, situation de formation accessible en ligne tels qu’exercices, évaluations à rétroactions différées, etc.).
[4] Même si cette modalité de formation n’interdit pas de se regrouper face à l’écran, nombreux sont les usagers qui préfèrent ne pas dépendre des agendas de leurs collègues et se retrouvent connectés seuls sur des temps « personnels ».
[6] L’ensemble de l’activité d’un acteur comme donnant lieu à la création et/ou à la manifestation d’un savoir quel qu’il soit à chaque instant.
[7] Auparavant, les seules modalités de formation consistaient en un temps de présentiel, souvent le mercredi matin pendant 3h ou en soirée après la classe.
[8] PE – Cas n°1 : « J’ai la responsabilité d’enseigner à des élèves de 7 à 9 ans : la lecture, l’orthographe, la grammaire, la calligraphie, la numération, le calcul, la géométrie, l’anglais, les sciences, l’histoire, la géographie, le sport et l’éducation civique (…) ».
PE – Cas n°1 : « (…) Moi en élémentaire je ne sais pas trop comment m’y prendre avec les raisonnements des enfants (… ) ».
[9] PE – Cas n°3 : « Je sais que c’est une classe virtuelle (…) Je sais que c’est une présentation donc je sais qu’on ne va pas nous demander de faire des milles et des cents (…) en fait je ne vais pas surpris du tout au cours de la formation… je ne sais pas quel est le programme de l’heure (…) mais à aucun moment en ce qui va se passer je vais être surpris…parce que je vais retomber sur des choses que j’ai déjà vécues. Soit que je connais (…) Je me rappelle ça devait être en animation ou je ne sais pas (…) ».
[10] PE – Cas n°3 : « (…) comme moi j’aime bien faire le clown je suis allé je ne sais plus lequel truc c’est (…) c’est coupé mais tu as une barre en dessous avec j’ai choisi j’ai mis un petit bonhomme histoire de faire le malin (…) ça montre que tu as pigé quoi (…) ».
[11] PE – Cas n°3 : « Je n’apprends pas des choses aux enfants, c’est eux qui apprennent. Mon métier consiste à mettre en place des situations leur permettant d’apprendre (ou d’apprendre plus vite ou plus facilement) ».
[12] PE – Cas n°3 : « Je me suis d’accord avec la collègue. Je lui ai dit je vais dessus ce soir, je vais créer la classe virtuelle ».
[13] PE – Cas n°3 : « Je mets en place des situations permettant à des enfants d’apprendre ou d’apprendre plus vite. Je dois pour cela prendre en compte le rapport qu’entretiennent les élèves avec les savoirs et les apprentissages en jeu car parfois (souvent), ces apprentissages n’ont pas de sens pour eux ».
[14] PE – Cas n°3 : « Quad tu vois les nouvelles orientations concernant la lecture, c’est hallucinant (…). Si je comprends bien et si je résume les discours influencés par les neurosciences, il ne faut surtout pas donner envie de lire aux élèves tant qu’on ne leur a pas donné le code…C’est affligeant…Ce n’est pas ma façon de faire, elle se ne se sera jamais ».
[15] PE – Cas n°3 : « Il faut mettre en place des situations qui permettent aux élèves de comprendre. Je dois être inventif et sortir des sentiers battus ».
[16] PE – Casn°3 : « Tu vois c’est comme quand j’utilise le TBI : je découvre toutes les potentialités de l’outil et je vois comment cela peut être utilisé en classe ou en formation pour proposer de nouvelles situations. Avec la découverte de la classe virtuelle, c’est pareil. C’est pour cela que j’aime bien tout tester (…) ».
[17] PE – Casn°3 : « Pour l’analyse du parcours qu’on avait à réaliser avec la collègue j’ai préparé le cadre et repris le plan. Elle n’avait plus qu’à litre et à compléter ».
[18] PE – Cas n°2 : « Vu que c’est quelque chose de très ouvert, l’élève peut s’approprier en fonction de ses capacités de ses besoins etc. … les nombres pour arriver à les apprivoiser en fait ».
PE – Cas n°2 : « J’ai trouvé intéressant par exemple élèves n’est pas consommateur d’exercices mais producteur. C’est vrai que c’est une démarche que je peux avoir dans d’autres matières et donc j’ai trouvé aussi intéressant de pouvoir l’appliquer à ça … les élèves choisissent eux-mêmes les nombres … ».
PE – Cas n°2 : « La réponse n’est pas la chose la plus importante parce que finalement…car après il n’y en appropriation de l’incitation et on voit que ça peut évoluer en fait que c’est la démarche surtout qu’il y a importante …voilà les critères qui sont définis avec les élèves dans l’incitation je trouve ça bien parce que comme ça ils restent « maître » … enfin ils ont les codes… En fait ça aussi c’est quelque chose qui est important… »
[19] PE – Cas n°2 : « Enfin je comprends bien ce qu’on me dit mais qu’est-ce que je vais faire de différent de d’habitude…donc voilà…ça j’ai trouvé intéressant sur le rappel des programmes sur le calcul en ligne…etc…Enfin je comprends mais comment dire je ne vois pas ce qui diffère de d’habitude en fait de ce qu’on fait déjà dans les classes…que tout le monde fait … et c’est ça ce que j’attends en fait c’est de voir quelle est la différence en fait … qu’est-ce que ça apporte en particulier le journal du nombre ».
[20] PE – Cas n°2 : « Donc voilà ça j’ai trouvé intéressant aussi finalement qu’on m’explique qu’il y a une phase d’appropriation de l’incitation sur laquelle on revient par la suite … donc voilà je reprends un peu confiance … donc là aussi super intéressant …incitation production d’élèves communication dans la classe etc… et donc là pour moi c’est vraiment le mode d’emploi et là je me sens vraiment rassurée par rapport à…par rapport à ce qu’il y avait plus m’inquiéter auparavant… »
PE – Cas n°2 : « Donc je sais que je l’ai donc je suis rassurée ».
PE – Cas n°2 : « Je retiens que ça a répondu à mes inquiétudes…enfin à mes questions par rapport au journal du nombre qui étaient de comment démarrer …. comment le mettre en place… que j’ai des outils maintenant sans être trop directif en même temps parce que c’est surtout en esprit en fait à comprendre et donc … pour moi le contrat est rempli en fait c’est-à-dire je suis incitée à mettre en place quelque chose en place dans la classe mais en même temps j’ai des outils qui vont me permettre de le faire après ça va être à moi de m’approprier ou pas l’activité… ».